Des associations de vétérinaires et de cynologie lancent une campagne pour qu’on en finisse avec la mode des toutous au nez trop plat. Et les graves problèmes qui en découlent.
Les bouledogues français ont la cote. Avec leur bouille ronde et leur air de bébé – ou d’«E.T.», c’est selon – leur nombre est passé de 740 en 2005 à plus de 10 000 aujourd’hui. Une tendance à la hausse qui se poursuit et qui concerne également d’autres races au nez écrasé (carlin, shih-tzu, pékinois).
Véritables handicapés
Mais, derrière cette «mignonitude», il y a une réalité bien moins glamour. À force de sélections excessives pour leur donner ce look qui fait tant craquer, avec une tête toujours plus grosse et un corps toujours plus ramassé, ces chiens sont devenus de vrais handicapés. Avec des problèmes au niveau des yeux, des oreilles, de la peau. Des difficultés à mettre bas naturellement, des paralysies de l’arrière-train, et surtout d’énormes complications respiratoires. Surtout par ces fortes chaleurs. À tel point que nombre d’entre eux meurent précocement ou finissent sur la table d’opération, rien que pour leur permettre de ne pas suffoquer. Comme «Javert» (4 ans), le bouledogue de Camille Laurent, une jeune assistante dentaire genevoise: «On a dû lui ouvrir les narines et lui raccourcir le voile du palais afin de lui dégager les voies respiratoires. On m’a expliqué qu’autrement il risquait de faire une syncope.» Une intervention qui lui a coûté près de 2000 francs. «J’adore cette race; elle a un côté tellement humain, tant physiquement que par son comportement. Je savais que ces chiens étaient un peu plus fragiles que d’autres. Mais je n’imaginais pas à ce point-là. Si j’avais su, je ne l’aurais pas pris…»
Campagne de sensibilisation
Pour contrer cette mode du chien sans museau, alimentée par le Web et les people qui l’exhibent tel un accessoire, plusieurs associations vétérinaires et de cynologie suisses ont lancé une grande campagne de sensibilisation contre les nez plats excessifs pour informer le public.
«Les gens achètent souvent ces chiens sur le Web. Ils sont produits dans des conditions exécrables, en grande quantité et de la forme qui plaît au public», souligne Marie Müller-Klauser, vétérinaire membre de l’Association suisse pour la médecine des petits animaux, une des instigatrices de la campagne, en soulignant qu’il y a aussi des élevages suisses qui profitent de la tendance et élèvent des chiens avec une babyface. Une véritable dérive. Car ces chiens n’ont pas toujours eu cette tête-là. Le crâne du bouledogue, par exemple, s’est raccourci de 25% par rapport à 1920. Et les clubs de races ont une grosse responsabilité. «Les juges déterminent les futurs reproducteurs. Tant que leur avis au sujet de la forme du nez ne changera pas, les éleveurs continueront à produire ces animaux à face plate», déplore la vétérinaire.
Travailler avec les éleveurs
Dans le cadre de leur campagne, les différentes associations entendent travailler avec les éleveurs, notamment en demandant la mise en place de tests de condition physique pour sélectionner les races de chiens concernées par cette problématique. Aujourd’hui, nombre d’entre eux sont incapables de fournir un effort puisque, même au repos, ils sont en manque d’oxygène. (Le Matin)
Source de cet article : www.lematin.ch / par Pascale Bieri